Mon réseau LinkedIn m’apporte beaucoup. J’investis du temps pour le nourrir, pour l’aider, je lui parle, je l’écoute, je l’entretiens. Dans mon réseau, j’applique autant de formes de leadership que je peux. Je crie mon message et ma cause, et je crée des opportunités pour aider des gens.
Ce réseau m’apporte tellement que j’ai décidé de lui redonner.
J’ai récemment fait un appel à tous aux recruteurs de Montréal, car je connaissais de près ou de loin deux développeurs qui cherchaient un emploi. J’ai pu les mettre en contact avec 7 recruteurs.
Et là je me suis demandé : que se passerait-il si je mettais mon réseau au service des chercheurs d’emploi de Montréal?
L’expérience
Le mardi matin, j’ai partagé sur LinkedIn l’image suivante :
Pendant les 2 jours qui ont suivi, j’ai reçu des messages privés d’une trentaine de personnes. J’ai discuté avec eux de ce que je tentais de faire. Je leur ai demandé ce qu’ils avaient réellement envie de faire, peu importe leur background.
J’ai passé une bonne partie de mon mercredi à compiler les coordonnées des candidats et les emplois qu’ils souhaitaient décrocher.
Le jeudi matin, j’ai publié cette image sur LinkedIn, avec un lien vers la liste des emplois que les candidats souhaitaient avoir :
Cette image a été désuète très rapidement, car d’autres candidats se sont ajoutés à l’expérience. Au final, ce sont 35 candidats qui ont été présentés.
28 recruteurs ou gestionnaires se sont manifesté le jeudi. Le vendredi matin, j’ai fait 71 mises en contact par courriel (oui, à la main ou presque). J’ai réutilisé le même message, et je l’ai personnalisé selon le poste que le candidat recherchait, et ajoutant les nom des deux intéressé.e.s.
Le week-end qui a suivi, j’ai envoyé des sondages aux candidats et aux recruteurs pour récolter du feedback. Les réponses au sondage sont présentées plus bas.
Les règles mystères
À mesure que l’expérience avançait, elle est passé de « je peux aider mon réseau à s’aider » à « il y a quelque chose à tirer de cette expérience ».
J’ai donc décidé d’imposer des règles à mon expérimentation. Elles n’étaient pas explicites pour les participants, c’était plutôt ma ligne directrice.
- L’expérience devait servir les candidats avant les entreprises.
- L’expérience devait favoriser le contact humain et la curiosité plutôt que les processus traditionnels d’embauche.
- L’expérience devait éviter que les candidats puissent être disqualifiés à l’avance par les entreprises.
Au final, puisque tout ce que je fais est pour promouvoir l’humain au cœur du monde du travail, l’idée était donc de favoriser le contact humain d’abord. Faire en sorte que les gens doivent se parler en premier lieu.
Le feedback
Voici les résultats des sondages envoyés. Je n’ai pas inclus toutes les réponses, beaucoup s’équivalaient, d’autres étaient moins pertinentes.
Feedback des candidats
22 répondants sur 35 (63 %) des candidats ont répondu au sondage.
Qu’avez-vous aimé de mon approche?
- Très pratique et bien ciblé. Sincère. Organisée.
- L’idée de mettre en contact des gens et l’attention portée.
- Innovante, il y a aussi un élément plus humain que de présenter des CV. Tu mets deux personnes en relation basé sur des intérêts communs, c’est comme le speed-dating. Le fait qu’Olivier ait pris le temps de nous mettre en contact, ça nous donne le goût de faire un effort supplémentaire par rapport à envoyer simplement un CV.
- L’approche personnalisée dans mon cas était super. La recherche d’emploi peut devenir longue et difficile. Cette l’une des plus plaisantes expériences auxquelles j’ai eu l’opportunité de participer.
- La rapidité de processus : vous avez pris 2 jours pour me mettre en contact avec 2 personnes.
- C’était simple, efficace et facile d’approche.
En quoi mon approche était-elle différente de ce que vous avez vécu auparavant?
- On ne m’a jamais offert ce genre d’aide sur LinkedIn.
- C’est ma première expérience et il y a eu connexion avec un donneur d’emploi. J’ai envoyé une note à la personne mais elle ne m’a pas répondu.
- J’ai eu des réponses très vite après votre contact. Vous apportez de la confiance entre les relations candidat/recruteurs.
- On sent que c’est pas « ta job » mais que ça te fait vraiment plaisir de nous aider.
- Approche simple et directe. Le fait que vous ne travaillez pas pour une agence, on va directement au but. Beaucoup plus à l’écoute de ce qu’on le recherche.
- L’intérêt réel pour la réussite, le côté authentique.
- J’avais jamais tenté la méthode « networking » auparavant. Cette méthode fut moins robotique, et a permis plus de contacts et de résultats dans mon cas que l’envoi d’un CV et d’une lettre de présentation à des postes ouverts sur LinkedIn ou Indeed.ca.
- Normalement, les gens ne veulent pas aider et s’ils disent qu’ils vont aider, il ne font pas de suivi. Lorsque je les relance, je n’ai plus de réponse. Un énorme merci à toi Olivier. Excellent travail!
- Moins de formalité, de la rapidité au niveau des réponses, mais surtout du partage de tes propres contacts.
Qu’avez-vous appris du monde du recrutement en participant à cette expérience?
- Je me suis sentie moins seule. Je sens que mon état de chercheur est partagée avec beaucoup d’autres.
- Il y a beaucoup d’autres moyens de mettre des gens en contact. On cherche trop à mettre une cheville dans un trou.
- Que le « networking » présente beaucoup plus de potentiel pour trouver un emplois qui me convient, et beaucoup plus d’opportunités sont offertes aussi!
- Que le recrutement commence par permettre aux autres d’accéder à nos propres réseaux professionnels.
- Cette méthode n’est pas vraiment destinée pour les nouveaux diplômés, je pense qu’elle est plutôt pour les gens ayant des expériences au préalable.
- Ça sert à quoi de donner une fortune à un chasseur de tête qui ne prend pas le temps de nous rencontrer, de nos jours?
- Cette approche est toute autre, elle est authentique… ça change des discours «formatés» et des rapports tendus candidat-recruteur.
Mettre son réseau au service des chercheurs d’emploi, est-ce une initiative que plus de gens devraient prendre?
- Oui : 95.5 %
- Peut-être : 4.5 %
Croyez-vous que vos chances de décrocher un emploi suite à cette expérience sont bonnes?
- Oui : 59.1 %
- Non : 22.6 %
- Je n’ai pas été sélectionné par un recruteur : 18.2 %
Feedback des recruteurs
13 répondants sur 28 (46 %) des recruteurs ont répondu au sondage.
Qu’avez-vous aimé de mon approche?
- Approche humaine, support positif tant aux chercheurs d’emplois qu’aux recruteurs.
- La sensibilité au besoin des autres, le sentiment réel de vouloir aider.
- L’offre directe adressée au réseau. C’est comme si on sauvait une première étape de démarchage.
- J’ai aimé la simplicité de l’approche, basée sur les intérêts professionnels des candidats.
- L’initiative de mettre en relation ton réseau de candidats en recherche active avec moi, de manière spontanée et sans attente particulière, en mode réseautage.
- Ton côté humain, comme toujours! 🙂
- La volonté d’aider sans intention pécuniaire.
En quoi mon approche est-elle différente de ce que vous avez vécu auparavant?
- C’était « vrai ». Objectif non-lucratif.
- C’est plus qu’un simple partage sur le fil d’actualité. Il y a un engagement humain derrière : celui de simplement vouloir aider avec un petit coup de pouce.
- Le fait d’avoir un intermédiaire dans mon sourcing : d’habitude je source directement via Linkedin mais il est difficile de cibler les candidats potentiels.
- Pas d’autre intérêt que de rendre service.
- Première initiative de ce type vue sur Linkedin (ce type de démarches existes, mais via les recruteurs rattachées à des firmes de recrutement uniquement – ou de manière isolée pour 1 ami à référer – tu as mis en contact de nombreuses personnes).
- Elle est bénévole.
- Volonté sincère d’aider sans autre attente particulière.
- Souvent, les gens veulent et recherchent le retour d’ascenseur ($) et oublient que c’est bien d’aider des gens pour le simple fait d’aider.
Qu’auriez-vous aimé que je fasse différemment?
- Dans mon cas, le candidat n’est pas sur le territoire canadien donc je suggère de mieux cibler ou mieux communiquer l’information à savoir « disponibilité de plusieurs candidats à travers le monde. »
- Ça me satisfait, compte tenu du temps que ça prends déjà d’avoir fait ça.
- Les candidats auraient pu fournir une petit paragraphe expliquant leur background.
- Pour une mise en relation, c’est bien. Si tu veux aller plus loin il y a pleins de choses à faire sans tomber dans les services d’une agence de recrutement.
- Tu aurais pu qualifier un peu plus tes candidats et tes contacts. Comme tu le sais, le recrutement, avant d’être un titre et une ville c’est un projet pour chacun avec beaucoup de critères plus ou moins affichés. Sans parler des valeurs et de l’aspect culturel… Bref c’est un métier et l’intermédiation pure et simple sera a terme remplacée par des machines.
- Dans notre cas, cela aurait été judicieux pour nous de savoir si les candidats étaient au Canada ou hors Canada, mais après tout, c’est à nous d’analyser les profils. 😉
- Être une référence dans la mise en relation sur Linkedin, nous pourrions (candidats potentiels et recruteur) vous contacter afin d’être mis en contact avec les candidats potentiels comme vous l’avez fait, pour vous faciliter le travail, une plateforme pourrait être mise en place.
- 1ère expérience très positive.
Croyez-vous que vos chances d’embaucher un candidat référé suite à cette expérience sont bonnes?
- Oui : 15.4 %
- Non : 23.1 %
- Peut-être : 61.5 %
Observations notables
Deux choses inattendues ont eu lieu durant l’expérience, l’une qui m’a émerveillé, et l’autre qui m’a déçue.
Une touche de déception
Un recruteur m’a demandé de lui divulguer l’identité des candidats afin de pouvoir les filtrer en avance, et s’assurer d’un bon « fit », et de ne pas leur créer des fausses attentes.
J’ai été surpris. Je lui ai expliqué que l’idée était justement de mettre des gens en contact sur un intérêt commun, et donc, de communiquer avec les gens, et non de discriminer/favoriser les profils. Il aurait peut-être des discussions très surprenantes avec ces candidats, et que le pire qui pouvait arriver, c’était qu’il aurait perdu 10 minutes de son temps.
N’ayant pas eu de réponse de sa part, j’ai tout de même fait les mises en contact par courriel. Je en sais pas si cette personne a accepté de parler aux candidats.
Tout cela est sans rancune, bien sûr. Si j’avais affiché les règlements mystères de l’expérience, peut-être que moins de recruteurs m’auraient contacté. On ne le saura jamais.
L’expérience a prouvé un point important
Un autre recruteur m’a contacté suite à l’expérience. Le candidat que je lui ai envoyé avait déjà postulé chez eux. Ils avaient mis son CV de côté, jugeant que son profil technique était trop junior.
Cependant, après avoir parlé au candidat, le recruteur avait un excellent feeling, et ils ont reconsidéré leur décision et ont accepté de le rencontrer en entrevue.
Contact humain : 1
Curriculum Vitae : 0
Mise à jour : Le candidat dont je parle ci-haut a finalement été embauché, et la candidate dont on m’avait demandé de divulguer l’identité a également été embauchée!
Contact humain : 3
Curriculum Vitae : 0
Cela fait un moment que j’ai décidé de ne plus mettre mon CV à jour et de ne plus l’envoyer à qui que ce soit. Ceux qui sont intéressés à moi peuvent venir me parler. On a ici une preuve que le CV ne dit pas tout et peut causer plus de tort que de bien. Pour ma part, je le considère davantage comme une nuisance. Un pas de plus vers la mort des Curriculum Vitae, dont même le nom est issu d’une langue morte.
Mes conclusions
La gratuité de la chose la rend plus belle
Dans le feedback reçu, il est très évident qu’autant les candidats que les recruteurs ont apprécié le fait que c’était volontaire, bénévole, et que le but n’était pas de me faire de l’argent.
Pour les candidats, je comprends. Ceux qui n’ont pas d’emploi actuellement vivent probablement sur des réserves, et se faire offrir de l’aide parce qu’on se soucie de leur sort doit redonner un peu foi en l’humanité.
Si faire cela pour les candidats allait de soi, disons que ce n’est vraiment pas par pitié des firmes de recrutement que j’ai fait cette expérience gratuitement. Je sais que la plupart apprécient qu’on se soucie véritablement des chercheurs d’emploi. De l’autre côté, j’ai fait une partie de leur travail, donc bien sûr, le fait que ce soit bénévole plait beaucoup.
Plusieurs personnes ont proposé d’automatiser ce service et d’en tirer profit. Cela m’est passé par la tête. Mais l’automatisation de cette initiative enlèverait l’élément humain et volontaire de la chose, et risquerait de créer une autre plateforme de placement comme il en existe déjà tant. D’un autre côté, je dois aussi vivre de mon labeur, et ne suis pas intéressé à faire du copier/coller de courriel à longueur de journée.
Bref, cette expérience m’ayant pris 15h en 3 jours a été excessivement payante pour mon réseau LinkedIn (300+ nouveaux contacts en une semaine, et l’un de mes posts ayant atteint 200+ likes et 25 000+ vues), pour mes valeurs et pour ma curiosité, mais absolument pas payante pour mon garde-manger et mon hypothèque, et là n’était pas le but.
C’était plus humain que le recrutement traditionnel
Autant les candidats que les recruteurs ont aimé l’humanité de mon approche. Je l’ai vu dans les réponses du sondage et dans les messages de remerciements que j’ai reçus en privé.
Je n’ai pas utilisé un processus mécanique et déshumanisant, j’étais à l’écoute des aspirations et des rêves des candidats, je n’avais cure de leur expérience passée, de leur ancienneté, de leurs compétences technique. J’étais à l’écoute de leur potentiel. Et même si je ne les connaissais pas, j’avais foi en eux et leur désir de réussir.
Recruteurs, réveillez-vous!
Je profite de la divulgation du résultat de cette expérience pour donner un peu de tough love à mes amis recruteurs. Qui aime bien châtie bien, dit-on.
Quand je pense qu’une expérience de coin de table comme la mienne a été perçue comme « plus humaine que le recrutement traditionnel », j’ai pitié pour les candidats, et je dis aux recruteurs de Montréal : vous allez faire quoi maintenant?
Allez-vous tolérer qu’un gars comme moi, qui n’est pas recruteur, qui sort de nul part et arrive comme un chien dans une jeu de quilles puisse marcher dans vos plates-bandes en improvisant une expérience, fasse gratuitement une partie de votre travail, et en plus, se fasse dire qu’il est plus humain, plus à l’écoute et plus efficace que vous?
Faites quelque chose! Tout de suite! Commencez par remettre en question vos processus et balancez vos checklists par la fenêtre. Vous êtes des humains aussi, pas des esclaves de vos outils. Revenez à l’essentiel. Pour qui faites-vous votre travail? Qui servez-vous? Vos patrons ou vos candidats? Votre entreprise serait-elle encore en affaires si vous n’aviez plus de candidats? Faites plier les règles, brisez-les et créez-en de nouvelles. C’est exactement ce que j’ai fait dans cette expérience. Vous serez surpris de ce que vous pourrez accomplir!
Bon. Maintenant que vous êtes réveillés, vous allez faire quoi?
Propriétaire de Primos Populi, partenaire et coach chez Moabi. En tant qu’ancien gestionnaire, je préconise l’approche “les gens d’abord, et le reste suivra”. Mes sujets de prédilection sont la culture organisationnelle, le droit à l’erreur et l’abaissement du centre de gravité du pouvoir décisionnel. Je cultive l’épanouissement des gens.