Note de l’auteur : De par la nature du sujet abordé ici, cet article est un peu plus personnel qu’à l’habitude. J’aimerais avoir votre rétroaction, si vous aimez cela, peut-être en écrirai-je davantage!
On en a tous un syndrome de l’imposteur qui dort quelque part, n’est-ce pas? Cette impression d’être dans une position qu’on ne mérite pas? Ce sentiment de mauvais augure nous indiquant que notre incompétence sera bientôt découverte et exposée au grand jour?
Ce n’est pas tout à fait binaire. On n’est pas toujours dans un contexte où nous ne sommes pas en contrôle, et où on ne sait pas ce que l’on fait. Mais ça arrive et ça fluctue avec le temps.
Dans cet article, j’aimerais qu’on parle un peu de cet éléphant qui s’impose dans toutes les pièces. Je ne connais personne qui n’a pas un jour ressenti ce syndrome. La bonne nouvelle, c’est que c’est tout à fait correct.
J’ai longtemps été un imposteur
Et pourtant ça s’est manifesté assez tard. J’étais très autodidacte bien avant le collège, et j’apprenais moi-même tous les trucs que je finirais par voir dans mes cours. Le résultat était assez intéressant : il est souvent arrivé que j’aidais un professeur à donner son cours, en aidant les autres élèves. J’ai même souvent « aidé » des professeurs à donner son cours, dans le sens qu’ils savaient plus ou moins ce qu’ils faisaient (eux et les ordinateurs, vous savez…), et moi je leur « enseignais ».
Donc j’étais vraiment très bon dans ce que je faisais. Cependant, j’étais très frileux à faire quoi que ce soit que je ne connaissais pas, de peur de ne pas savoir comment faire. C’était donc beaucoup plus contrastant pour moi.
L’imposture a commencé le jour où je me suis fait précipiter vers mon principe de Peter. C’est-à-dire qu’un jour, je me suis retrouvé chef d’équipe, et je devais gérer 7 personnes.
Personne ne m’avait préparé. Personne ne m’avait formé. Les attentes envers moi n’étaient généralement pas claires, et lorsqu’elles l’étaient, je n’avais pas la moindre idée de comment m’y prendre pour y répondre. Je n’avais pas de guide. J’étais un imposteur complet. Et j’étais stressé 100% du temps. Ça n’a pas été facile…
Savoir être vulnérable
Le syndrome de l’imposteur est grandement lié au sentiment de vulnérabilité qui l’accompagne. On ne sait pas ce que l’on fait, on ne se sent pas en contrôle, mais les attentes envers nous persistent.
Éventuellement, il faut savoir accepter que personne ne peut s’attendre de nous de tout savoir ou tout faire parfaitement du premier coup. La première chose à faire est d’admettre qu’on ne sait pas tout.
« Mais Olivier, dans l’entreprise ou je travaille, c’est risqué de faire ça! »
Oui, ça arrive. Toutes les entreprises ne sont pas nécessairement psychologiquement sécuritaires. Mais la première personne à qui il faut admettre qu’on ne peut pas tout savoir et tout faire parfaitement, c’est soi-même. On doit se donner à soi-même le droit de se tromper, et le droit de ne pas savoir.
Adopter un esprit de croissance
Une fois qu’on a accepté qu’on ne peut être parfait et tout réussir du premier coup, l’étape naturelle qui suit est de simplement approcher ces défis avec curiosité plutôt qu’avec une crainte d’échouer.
Il est très important de comprendre et d’accepter que l’échec n’est pas le contraire du succès, c’en est la pierre angulaire. Je pourrais passer des heures à chercher des citations sur le sujet, je n’en utiliserai qu’une seule, car je trouve qu’elle vaut tout l’or du monde.
Thomas Edison aurait échoué des milliers de fois dans le processus d’invention de l’ampoule électrique. Questionné par un journaliste qui lui posa une question sur tous ces échecs, il aurait répondu ceci :
Certains diront que cette citation a été inventée de toute pièce. Cela m’importe peu. Elle reste très puissante.
Tout le monde est un imposteur
Alors là, c’est une excellente nouvelle n’est-ce pas? Je vous garantis que 100% des gens sur cette planète sont des imposteurs. C’est à dire qu’ils ne sont pas en contrôle 100% du temps, et doivent éventuellement improviser sans avoir la moindre idée de ce qu’ils font.
Et c’est vrai spécialement dans le monde du travail. Beaucoup de gens prétendent être totalement en contrôle. Vous imaginez les variables que cela implique? Imaginons un président d’entreprise qui prétend être complètement en contrôle dans son rôle. Cela signifie que tous les employés sont motivés, satisfaits, productifs, comprennent bien leur rôle. Personne ne quitte, tous les clients sont heureux, personne n’est malade, le marché est en parfaite santé, il n’y a aucune pénurie, tous les postes sont comblés, pas de panne de métro, pas de trafic…
Ceux qui prétendent qu’ils sont en contrôle sont probablement en constant combat afin de garder ou de reprendre ce contrôle. Mais être en contrôle à 100%? Racontez cela a un cheval de bois, et il va vous ruer. C’est des fadaises.
Je donne un exemple plus concret. Je travaille avec des développeurs. Ils sont bons, c’est leur métier. Ils savent coder, ils connaissent les infrastructures. Cependant, lorsqu’on décide d’une nouvelle fonctionnalité à développer, ils doivent se casser la tête, ils essaient, se trompent. Il y a des bugs, des cas exceptionnels auxquels ils n’ont pas pensé.
Ils doivent « trouver » comment faire à mesure, dans un gros pourcentage de leur travail. On les paie pour ça.
Moi-même, je me considère comme un bon gestionnaire (de par mes propres standards, on s’entend). Je vous dirais que je connais assez bien les grandes théories du domaine, la motivation intrinsèque, le leadership engagé, la gestion bienveillante, et bien honnêtement, dans 90% des problèmes sur lesquels je dois intervenir, je n’ai pas la moindre idée du chemin à prendre. Et pourtant, on trouve des solutions.
Solution facile : Devenir une sommité mondiale
Depuis que Primos Populi existe, j’ai souvent proposé à des gens d’y contribuer. « Tu voudrais écrire sur le sujet? »
Ça semble terroriser les gens. J’en ai parlé avec plusieurs. Certains ont mal dormi suite à cette question. D’autres répondent simplement « Mais je suis qui pour parler de ça? ». Ou souvent, « Je ne suis pas du tout une experte! Je n’ai pas ton expérience là-dessus! ».
En effet, c’est assez intimidant d’avoir à parler d’un sujet qui nous intéresse mais dans lequel nous ne sommes pas du tout expert. J’ai souvent voulu faire ainsi, et je me suis retenu, car d’autres personnes ayant bien plus d’expérience pourraient me corriger, me dire que j’ai tort. Et pourtant j’en suis venu à créer ce site, sur lequel je m’exprime sur le recrutement (bien que j’embauche des gens, je n’ai pas grand expérience en recrutement), sur les ressources humaines (je n’ai jamais travaillé en RH), sur le leadership (personne ne m’a jamais dit « tu es mon leader et je te suis »).
Et je vais vous donner mon secret.
En réponse à une femme de mon réseau à qui j’ai un jour proposé d’écrire, et qui était vraiment très intimidée et hésitante, j’ai répondu ceci :
Peu importe le sujet abordé, tu es la SOMMITÉ MONDIALE sur :
– Comment tu te sens par rapport au sujet
– Ton expérience personnelle avec le sujet
– Tes désires et souhaits par rapport à ce sujet
– Comment ce sujet t’affecte personnellement
Et c’est vraiment ainsi que j’en suis venu à écrire des articles comme celui-ci. Vous croyez peut-être que j’ai lu tous les livres sur le syndrome de l’imposteur? Détrompez-vous. Pas un seul. Tout ce que je déballe ici est mon expérience personnelle, mes observations, mes croyances, et les résultats que j’ai récoltés jusqu’ici.
Et quand on y pense, quel est le pire qui puisse arriver réellement? Que personne ne vous lise? Fort improbable, puisque les mauvais jours, j’ai quand même pas mal de lecteurs. Qu’ils ne soient pas d’accord? C’est possible. Mais je n’ai jamais vu personne dire « Vous n’êtes clairement pas une sommité dans le domaine! »
Au contraire, les gens sont plutôt surpris de voir à quel point les lecteurs réagissent, et peuvent se reconnaître dans l’expérience des autres.
Vous sentez-vous prêts à faire face à votre syndrome de l’imposteur?
Je suis toujours à la recherche de contributeurs!
Je suis toujours un imposteur, et c’est OK
Alors que je frappais mon principe de Peter en 2014, quelques années plus tard, je me retrouvais à avoir une position très ferme sur ce qu’est réellement un gestionnaire. Certains disent « Fake it ’till you make it ». J’ai simplement lu, observé, discuté, et finalement je me suis fait une tête. Et malgré tout cela, j’ai n’ai toujours pas la moindre idée de ce que je fais la plupart du temps.
Pour ce qui est de mon blogue? Je suis toujours un imposteur. Chaque fois que je commence un article, je me dis que je le fais plus pour les lecteurs que pour moi. Pour les inspirer. Pour confirmer que je ne suis pas fou, ou seul à vivre ces choses.
J’ai cessé de m’en faire avec cela, et je pousse sur mon esprit de croissance. J’ai beaucoup de projets pour Primos Populi, dont un projet de livre qui sera inspiré de mon Petit guide pratique du parfait mauvais gestionnaire.
Lorsque j’ai ajouté la mise à jour disant « Restez aux aguets pour le livre, à venir en 2019 », vous imaginez-vous que je me sentais en contrôle? Je me suis engagé envers vous à écrire un putain de livre! Je n’ai pas la moindre idée de comment je vais m’y prendre. Mais en 2019, je pourrai dire que j’ai écrit un livre. C’est beaucoup plus fort pour moi que la peur d’en écrire un. C’est mon esprit de croissance doublé de mon désir d’antifragilité qui remportent ce combat interne ayant lieu dans mes tripes.
Et j’aimerais terminer cet texte en citant un passage de l’article de Marie Pelletier. C’est le premier et seul article qu’elle ait écrit ici, et qui est en lien avec le sujet du jour : The perks of being an impostor (en anglais seulement). Je vous en fait la traduction.
« Je ne sais pas » est une phrase que je dois prononcer souvent, mais elle est presque toujours suivie de « … mais je peux apprendre comment ». Le manque de connaissance n’est pas un obstacle insurmontable, mais plutôt un léger détour.
Marie Pelletier
Capsule vidéo reliée à cet article
Propriétaire de Primos Populi, partenaire et coach chez Moabi. En tant qu’ancien gestionnaire, je préconise l’approche “les gens d’abord, et le reste suivra”. Mes sujets de prédilection sont la culture organisationnelle, le droit à l’erreur et l’abaissement du centre de gravité du pouvoir décisionnel. Je cultive l’épanouissement des gens.