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Employée undercover

Ah les gestionnaires. On les malmène lors de tous les congrès et colloques. Ils ne comprennent rien. Ils sont responsables de tous les maux. Ils ont des égos. On veut qu’ils décollent des organisations et fassent place aux organisations libérées. Mmm… En tant que nouvelle gestionnaire et vieille milléniale cuvée 1982, « ça me gosse ». Il y a sûrement une façon d’être un bon gestionnaire dans une organisation traditionnelle. Après tout, rien de mieux que de pirater de l’intérieur d’une organisation pour la « transformer sans le savoir », du genre à la « Enceinte sans le savoir ».

Regard sur mon parcours d’employée à boss des bécosses, soit dans la nuit du 14 au 15 octobre 2019.

Directrice de l’expérience-employé. C’est mon rôle.

Ces mots me hantent.

Directrice (outch).
De (c’est une préposition, ça va).
L’expérience (scientifique?).
Employé (j’imagine que ça veut dire humain).

Pour tout vous dire, j’ai voulu étant très jeune (i.e. entre 20 et 30 ans) être gestionnaire. À force de les côtoyer dans mes fonctions de conseillère en développement organisationnel, j’en suis venue à me dire que pour 15 000 $ de plus par année, ça ne valait pas le stress. Le stress de gérer des conflits, le stress de faire 50 heures et plus par semaine, le stress de développer les autres à la vitesse requise (plus vite que la lumière idéalement). Voyez-vous, j’aime compter en taux horaire.  Ayant la chance (ironie) d’avoir fait mes maths collégiales, je sais que K$/52 semaines/n heures = le taux horaire.  Les deux premières parties de l’équation sont des constantes, du moins quand on est fonctionnaire comme je l’étais. Bref, en devenant moins jeune, j’ai décidé que de gérer des conflits et des employés sous performants pour des « peanuts », ça ne me disait rien.

Utiliser mon leadership au service des autres et rendre accessible à tous les résultats de ma curiosité insatiable, tel serait mon destin. Faciliter des rencontres pour créer avec mes collègues, pour mes collègues, devint ma devise (bon, je sais, j’aurais sûrement pu trouver plus élégant comme formulation).

2 enfants et une sabbatique de 16 mois en Australie plus tard, j’étais un peu rouillée. En 2019, mon nouveau slogan devint « à gang on sait tout » (notez ici le très mauvais français) et j’accélérai mon utilisation de l’intelligence collective et de la force du réseau. J’avoue que cette façon de faire m’a permis de rattraper plusieurs années de sevrage intellectuel.

Me voici maintenant à 37 ans et demi, encore jeune mais moins jeune. Je compte en demi pour répondre aux besoins de précision de mes deux enfants.

Me voici sur une chaise de directrice de l’expérience employé (EE). Mais pas n’importe quelle chaise. Une chaise où les EE, aka les RH, siègent au comité de gestion et démontrent leur contribution à la stratégie d’entreprise. Une chaise pas traditionnelle du tout. Une chaise qui me pousse à expérimenter tout ce que j’ai lu au fil des années et que je n’ai jamais pu faire dans une autre chaise. Bref, c’est une chaise magique : elle a été faite sur mesure pour mes foufounes.

Je peux être moi-même : une facilitatrice, une coach, une visionnaire. Je me sens une employée comme les autres, un humain investi d’un rôle simplement différent des 340 autres rôles chez Logisco, l’entreprise dans laquelle je fais épanouir mon cerveau pour créer un monde meilleur. J’ai appris dernièrement que ma façon d’être à nom : le leadership participatif. Moi qui n’aime pas les étiquettes.

J’ai remarqué qu’en incarnant ce nouveau genre de gestionnaire, des conflits et des employés sous-performants, il y en a très peu. Mon devoir est de développer ma gang et de créer des espaces sécuritaires pour aiguiser nos compétences d’équipe. Avec ce mandat en tête, s’il y a des conflits et des employés moins bons, et bien ce sera un peu beaucoup de ma faute. Je peux donc travailler 40 heures semaines et être un exemple de conciliation travail et vie personnelle pour mon équipe.

Expérience-employé. Deux mots qu’il ne faudra jamais galvauder et dont la signification est à bâtir. Ce sens et cette expérience seront cocréés avec ma gang de 340 collègues. Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas qu’on te fasse. Je paraphrase. Je n’aime pas qu’on décide à ma place, j’imagine que c’est pareil pour les autres.

Dans mon rôle de directrice, j’ai enfin la chance d’influencer le cours des événements sur des sujets qui me passionnent et qui impacteront la vie de mes collègues et de nos clients.

Mais avant tout, je suis au service des autres. Je me dois d’être la Queen d’enlevage de cailloux dans les souliers de mes compatriotes. Adieux irritants, irrégularités, règles bizarres et manque de clarté.

Directrice de l’expérience-employé. Ces mots, depuis peu, ont cessé de me faire frémir. Je veux les porter fièrement et propager la bonne nouvelle. Je veux côtoyer d’autres gestionnaires qui partagent cette vision de ce rôle. Je veux qu’on arrête de toujours mettre la faute sur les gestionnaires en les mettant tous dans le même panier. Nous ne sommes pas en voie de disparition, nous sommes en mutation. Nuance.

Facilitation, leadership participatif, équipe autonome, agilité, amélioration continue, innovation, rigueur, curiosité intellectuelle obsessive, scientifique en herbe, comportements humains. Ces mots vous allument? Restez à l’affût de mes chroniques pour suivre mes aventures de pirate, « d’employée under cover ».

– Annick

P.S. Maintenant que je me suis présentée sommairement, ça serait le fun qu’on fasse un tour de table virtuel 😉

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Employée undercover
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D’employée à gestionnaire : premières impressions d’une nouvelle directrice dans une ère où ce mot est en voie de disparition.
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